lundi 28 décembre 2009

Le Boxing Day 2009

Le 26 au matin, je ramassais les reliquats du dîner de Noël lorsque mon portable sonne; c’est le journaliste Yvan Côté qui me demande si je peux le rejoindre devant le Future Shop de la rue Ste-Catherine à 11h30. J’accepte avec plaisir son invitation à ce rendez-vous médiatique devenu une habitude le jour du Boxing Day. Un court extrait de cette entrevue a été diffusé le jour même aux journaux télévisés de Radio-Canada et de RDI.

Après cette entrevue, un autre journaliste du journal 24h, Jean-Marc Gilbert, a également souhaité m’interviewer sur le Boxing Day; il a rapporté certains de mes propos dans un article paru le jour même, « Regarder plutôt que dépenser ».

Aux alentours de midi, j’ai pris quelques photos; si vous étiez là, rassurez-vous, car j’ai brouillé tous les visages. Sur la première, on voit la longue file d’attente devant le Future Shop de la rue Ste-Catherine. La seconde elle, permet de constater à quel point la foule était dense sur la rue St-Catherine.

Dans l’attente de l’ouverture des magasins, Danièle et moi sommes allés prendre un latte au lait de poule au Second Cup de la rue McGill College. Après cette agréable pause, nous avons visité plusieurs grands magasins; ils étaient tous bondés. Chez Ogilvy, une longue file de personnes attendait devant la boutique Lacoste. Chez Simons, la foule se bousculait dans tous les rayons, comme en témoigne cette photo. Même chose chez La Baie sur à peu près tous les étages.

Partout, les soldes étaient importants; par exemple, j’ai vu chez La Baie des cravates pure soie réduite de 40% auquel on ajoutait un rabais additionnel de 25%. Les gens semblaient d’humeur joyeuse et plusieurs portaient des paquets, preuve qu’ils avaient acheté quelque chose; ceci confirme un sondage pancanadien commandé par la Banque Scotia dont les résultats on été publié à la une du Globe and Mail le 16 décembre 2009 (Andrew Mayeda, Consumers in buying mood). Impossible de prédire le chiffre d’affaires du Boxing Day 2009 à Montréal ou au Canada; ces résultats seront publiés d’ici quelques jours, voire quelques semaines; mes observations me permettent toutefois de conclure qu’à Montréal en tout cas, ce fut un succès.

J’espère simplement que les consommateurs ne sont pas surendettés pour faire plaisir à leurs proches, ou à eux-mêmes, car l’hyperendettement, je le rappelle est ce qui a déclenché la crise économique actuelle à l’été 2007.

mardi 15 décembre 2009

Consommez certes, mais pensez aussi aux autres!

Chaque année, pendant la période de grande consommation des Fêtes, je publie une chronique portant sur les dons aux personnes défavorisées, démunies, voire incapables d'assurer leur simple survie quotidienne.

Chaque année, je déplore le fait que le Québec fasse piètre figure à ce chapitre; ce fut le cas pour 2006, pour 2007… et c’est toujours le cas pour 2008 selon les chiffres publiés par Statistique Canada.

Pour l’année 2008, cette agence gouvernementale fait état d’une baisse de 5,3% du montant total des dons (8,1 milliards CAD), malgré une augmentation de 1,7% du nombre de donateurs (5,8 millions). Le don médian s’établit à 250$, « ce qui signifie que la moitié des donateurs ont donné plus et l'autre moitié moins. »

Le palmarès des villes, provinces et territoires se décline ainsi : 1. la ville d’Abbotsford-Mission (Colombie-Britannique) est bonne première toutes catégories avec un don médian de 600$; 2. le Nunavut, assurément pas la région la plus riche du Canada, se classe pourtant au premier rang des provinces et territoires avec un don médian de 500$; 3. quant au Québec, qui a pourtant moins souffert de la crise économique que d’autres provinces, il se classe bon dernier avec un maigre 130$, alors que chez ses voisines, l’Ontario et le Nouveau-Brunswick, le don médian s’élève respectivement à 300$ et 290$.

Ces statistiques parlent d’elles-mêmes; inutile d’en dire plus sur le manque de générosité des Québécois. En outre, l’article « Les banques alimentaires dans le rouge », publié par la journaliste Stéphanie Bérubé dans le quotidien La Presse le 14 décembre 2009, révèle que la misère humaine grandit dans la province : « Québec [le gouvernement] a versé hier une aide d'urgence de 250 000$ aux banques alimentaires de la province, un geste qui arrive à point nommé. Moins de deux semaines avant les Fêtes, leurs donateurs se font plus rares, alors que davantage de gens frappent à leurs portes. »

Pourtant, il n’est pas difficile de donner; dans la classe moyenne, la vaste majorité des gens peuvent aisément donner 1% de leurs revenus bruts sans se priver. Dans les classes plus aisées, ce pourcentage est plus élevé; le Président Clinton n’affirmait-il pas donner 10% de ses revenus? Si tout le monde adoptait ce principe, il y aurait beaucoup moins de pauvreté et de misère humaine.

C'est Noël et il est normal, même désirable, de faire plaisir à ses proches et à ses amis, voire de se gâter soi-même un peu; toutefois, il serait bon de penser aussi un peu plus aux déshérités. Québécois, il n’est pas trop tard : sortez votre chéquier!

samedi 12 décembre 2009

Consommation et santé : Les Fermes Morgan

Je publie cette chronique pour rendre service à John Bastian, un ami de longue date qui a consacré une bonne partie de sa vie à l'agriculture et à l'élevage biologiques. Il souhaite vous adresser le message ci-dessous.

« Chers clients et amis,

Depuis plus de 20 ans, mon projet de retraite a été de cultiver de la nourriture santé biologique pour le plus grand nombre de personnes possible. Ce fut une belle aventure, et comme toutes aventures elles arrivent à une fin à moment donné. Ce projet est devenu plus ambitieux que je ne l’avais planifié au départ. On nous a dit à maintes reprises combien on apprécie la Ferme Morgan en tant qu’endroit où on peut se procurer une belle variété de viandes biologiques, ainsi que de produits de la boulangerie faits avec notre farine de grains entiers fraîchement moulue sur place. Nous vous remercions sincèrement pour votre support et vos commentaires durant toutes ces années.

Ma femme Janice et moi arrivons à de nouveaux carrefours dans nos vies. J’aurai 70 ans l’an prochain, et Janice est redevenue de plus en plus active avec sa pratique de Chiropracticienne. Avec l’état de l’économie mondiale actuelle et le besoin absolu d’avoir accès à des aliments biologiques et locaux, nous sommes attristés du fait qu’à moins de trouver une nouvelle solution, nous devrons probablement envisager de cesser les opérations de la ferme. Notre participation dans les marchés biologiques annuels, ainsi que l’ouverture du magasin ne pourront plus continuer.

Nous vous écrivons, chers clients et amis appréciés, pour vous informer premièrement de la situation et du dénouement possible dans la prochaine année. Nous avons regardé plusieurs solutions afin de maintenir la ferme en activité, mais à date n’avons trouvé aucune alternative viable. C’est pour cela que nous souhaitons diffuser cette information en ce moment et vous demander aussi, en tant que gens qui sont fidèles à la ferme, si vous connaissez des personnes qui pourraient avoir un intérêt, un rêve à s’impliquer dans la continuation d’un projet comme celui-ci. La ferme est rendue à une dimension où trois couples et leurs familles pourraient bien gagner leur vie avec les activités d’agriculture, de transformation des aliments et de distribution. Parmi les différents édifices inclus sur la ferme, trois maisons sont aussi disponibles en location à des gens désirant s’y établir. La ferme possède une grande infrastructure.

Au sud de nos frontières, nous avons entendu parler de projets où les consommateurs se sont regroupés ensemble pour opérer leur ferme afin de s’assurer l’accès à de la nourriture santé. Il y a déjà un intérêt à la Ferme Morgan d’ouvrir une Coop, mais pour cela il faudrait une grande participation de consommateurs intéressés à devenir membres, avec une contribution active ou passive.

Si vous êtes intéressés par une participation quelconque, avez des idées que vous voulez partager ou avez tout simplement des questions, s.v.p. écrivez-nous à john@fermemorgan.com ou appelez-nous à 819-687-9021. Nous planifions organiser des sessions d’information ici à la ferme et serions ravis de votre présence et participation.

Nous sommes arrivés à un carrefour où nous avons essayé différentes possibilités, et nous n’avons plus beaucoup de solutions disponibles afin de garder la ferme en activité, même pour une prochaine année. Tout intérêt ou solution créative sont donc les bienvenus. Nous souhaitons ardemment que le rêve de la ferme puisse subsister, afin de continuer à offrir des alternatives santé et durables d’alimentation. Nous espérons que de nouvelles solutions fraîches se présenteront afin que la Ferme Morgan continue à avoir une longue vie!

Avec appréciation, »

Janice et John

samedi 21 novembre 2009

Consommation et nouvelles technologies

C'est un grand plaisir pour moi de vous présenter aujourd'hui quelques extraits tirés de l'introduction de mon plus récent ouvrage (p. 12 à 16), Consommation et nouvelles technologies, Au monde de l'hyper.

Les fouilles archéologiques démontrent que, dès l’aube des temps, le développement technologique était étroitement lié à la survie; on pourrait donc qualifier de fonctionnelles les attentes dominantes des premiers hommes à l’égard des outils rudimentaires qu’ils ont inventés. Par là je veux dire que ces outils devaient remplir efficacement une fonction particulière ; par exemple, la lance avec une pointe en silex devait permettre au chasseur de tuer sa proie avant d’être lui-même dévoré. Il y a cependant lieu de croire que d’autres types d’attentes, symboliques par exemple, pouvaient également exister; comment expliquer la décoration sur la lance, sinon comme un symbole conférant un statut ou un pouvoir au chasseur? On peut donc dire que le développement technologique se faisait alors principalement selon un paradigme de nécessité.

Or, de toute évidence, tel n’est pas le cas actuellement dans notre société d’hyperconsommation; le développement technologique est aujourd’hui essentiellement dicté par des considérations commerciales, en tout premier lieu la nécessité pour les fabricants de différencier leurs produits de ceux de leurs concurrents. L’iPhone 3G, lancé au Canada en juillet 2008, en est un exemple éloquent. Loin de moi l’idée de dénigrer ce gadget qui de toute évidence plaît à un segment de marché bien précis; sinon, comment expliquer, lors de son lancement, les files d’attente interminables devant les magasins pour avoir le privilège d’être parmi les premiers à posséder cette merveille? Son design satisfait indubitablement des attentes esthétiques et ses nombreuses fonctions, trop nombreuses en fait pour l’utilisateur moyen, permettent à ses usagers d’en justifier l’achat sur le plan utilitaire (attentes fonctionnelles). La question n’est pas là. Le principal attrait du iPhone tient à l’image, au mythe devrais-je dire, qu’Apple a développée autour de celui-ci, comme autour de ses autres produits, l’iPod, par exemple; comme ce dernier, l’iPhone est un objet culte, un symbole de statut (attentes symboliques), voire, pour certaines personnes, une possession qui leur permet de rehausser une estime de soi un peu faible (attentes imaginaires). L’image de l’iPhone, comme celle de produits concurrents, tels le Touch Diamond (HTC) et l’Omnia (Samsung), offrant un design, des caractéristiques et des fonctionnalités très similaires, permet à Apple, HTC et Samsung de vendre leurs produits plus cher que d’autres produits de leurs gammes respectives, car les amateurs de ces gadgets sont moins sensibles au prix, pourvu que celui-ci demeure dans une gamme dont on a sans aucun doute établi les limites (attentes financières). On peut donc dire que le développement technologique se fait aujourd’hui selon un paradigme d’échange marchand. Qui plus est ce paradigme est également mercantile, il repose sur la cupidité, la recherche de profits excessifs, bien souvent sans égard pour la qualité et la durabilité du produit, les clients et les employés.

Sous une forme ou sous une autre, tout comme la technique, la consommation a toujours existé. Certes, on peut penser que l’homme des cavernes pouvait subvenir à toutes les nécessités de la vie — boire et manger, se vêtir et se prémunir contre les éléments — sans faire appel à qui que ce soit, sans même faire du troc avec ses semblables. Mais on se dit également que, au bout d’un certain temps, il a sans doute compris que tout faire seul était à la fois fatigant et ennuyeux; manger de l’ours pendant deux mois parce que celui qu’on a abattu faisait trois cents kilos peut devenir monotone alors qu’il est si simple d’en troquer quelques dizaines de kilos contre un peu d’élan que le voisin de caverne a tué de son côté. Cela fait de la variété à table et de la conversation avec ses semblables. Voilà comment on peut imaginer le début du commerce et de la consommation.

Aujourd’hui, rares sont ceux qui subviennent seuls à ce que nous appelons nos besoins. Il est vrai que certains confectionnent leurs vêtements, d’autres cultivent un potager ou élèvent des lapins, quelques-uns chassent le chevreuil ou le canard sauvage, plusieurs vont à la pêche; on en voit même qui fabriquent des meubles et qui assemblent leur propre ordinateur. Je n’ai en revanche jamais entendu parler de quelqu’un ayant réussi à fabriquer soi-même et sans outillage spécialisé le processeur sans lequel aucun ordinateur ne peut fonctionner; en fait, sauf à mener une vie spartiate recluse au fin fond des bois que même les plus convaincus défenseurs de la simplicité volontaire ne voudraient pas, personne ne peut subvenir seul à toutes les nécessités de la vie. Hier comme aujourd’hui, on ne peut pas ne pas consommer, c’est-à-dire s’adresser au marché pour acquérir des choses que requiert notre bien-être, voire notre simple survie. La consommation est en somme un acte essentiel. Elle est également essentielle sur le plan collectif — rappelons-nous les nombreux responsables politiques et représentants du monde des affaires qui ont incité les populations à reprendre leur consommation au paroxysme de la crise économique récente.

La consommation n’est pas seulement indispensable, c’est également une activité agréable, parfois ludique, source d’un plaisir que certains, il est vrai, s’autorisent à l’excès au point de crouler sous un endettement si démesuré qu’ils deviennent incapables de faire face à leurs obligations financières. C’est évidemment dramatique, tant sur le plan personnel que sur le plan collectif — cela a constitué un des principaux facteurs qui ont entraîné le monde dans la crise.

La technologie aussi a envahi nos vies. Plusieurs diront qu’elle a libéré l’homme. Vu sous un certain angle, c’est rigoureusement exact. Pensons aux corvées ménagères grandement facilitées par toutes sortes d’appareils électroménagers. Elle a aussi permis à l’homme d’exprimer plus aisément sa créativité; par exemple, des logiciels pas très chers permettent désormais à des personnes dont l’aptitude pour le dessin est limitée de créer des présentations et des sites web dont les illustrations rivalisent avec celles réalisées à main levée par un dessinateur professionnel avant l’ère de la micro-informatique. En conférant une grande liberté de mouvement à la classe moyenne, les véhicules automobiles ont permis le développement de l’Amérique du Nord telle que nous la connaissons aujourd’hui. Un transport aérien rapide et relativement bon marché a rapproché les continents et permis à des personnes disposant de revenus moyens de découvrir des contrées aussi exotiques que lointaines, un privilège autrefois réservé à une élite.

La technologie n’a cependant pas produit que des effets bénéfiques. Outre le fait d’exacerber l’individualisme, voire l’égoïsme, elle a paradoxalement aussi induit une forme de dépendance, parfois même de ce qui s’apparente presque à l’esclavage. Pensons aux millions de personnes qui, les yeux rivés à un écran, alignent jour après jour, dans bien des cas nuit après nuit, des milliers de lignes de codes pour apprendre aux ordinateurs comment traiter des quantités colossales d’information. Plus simplement, rappelons-nous notre désarroi lorsque notre ordinateur personnel tombe en panne. Et puis la technologie a contribué à élargir l’écart entre nations riches et nations pauvres, favorisés et défavorisés, bref elle a créé un fossé numérique.

Dans cet ouvrage, nous nous pencherons sur la place de la technologie dans l’évolution de nos sociétés et sur son rôle dans l’émergence de la société d’hyperconsommation. Nous dirons que ce rôle est à la fois direct, parce que le développement technologique a multiplié l’offre de produits dont sont friands les consommateurs, et indirect, parce que les nouvelles technologies ont transformé les secteurs de la production, du commerce et de la finance. Elles ont ainsi permis d’abaisser le coût de production, de créer un nouveau réseau de distribution en ligne, de concevoir des produits financiers dérivés. Bien entendu, il n’y a rien de mal dans ces progrès technologiques; c’est la nature humaine qui détermine l’usage positif ou négatif qu’on en fait. La réduction des coûts de production aurait pu être mise à profit pour réduire les prix, permettant l’accès d’un plus grand nombre aux produits; la cupidité humaine y a plutôt vu l’occasion d’augmenter la profitabilité des entreprises, après avoir bien sûr ajouté quelques fonctionnalités aux produits dans le but de les différencier des produits concurrents.

Nous n’avons pas voulu brosser ici un simple bilan historique des différentes technologies; bien sûr, nous en présentons l’évolution, mais en démontrant leur lien avec la consommation. Notre intention n’est pas de faire une énumération de toutes les versions et de tous les usages des nouvelles technologies; nous entendons simplement en décrire l’explosion avec suffisamment de précision pour qu’on mesure la place qu’elles ont fini par occuper dans nos sociétés. On ne trouvera pas non plus ici une critique acerbe de la technologie en général; d’autres avant nous se sont chargés d’en diaboliser l’usage. Comme dans nos autres travaux, notre critique est modérée et constructive. Nous cherchons à présenter les avantages de la technologie tout autant que les dérives qu’elle peut entraîner, à démontrer le lien étroit entre consommation et technologie, et à expliquer pourquoi hyperconsommation et hypertechnicisation de notre monde vont de pair.

dimanche 1 novembre 2009

La nature compensatoire de la consommation

Voici quelques extraits du livre « Consommation et image de soi, Dis-moi ce que tu achètes… » que j’ai publié en 2005 (pages 108 à 110). J’y démontre la nature compensatoire de la consommation pour certaines personnes.

Prolongeant la réflexion sur le rapport entre l’image d’un produit et l’image de soi, je voudrais démontrer le rôle compensatoire que peut jouer la consommation pour des personnes dont l’image de soi est négative, établie par leur faible estime de soi. Je propose d’appeler « inadéquation compensatoire » la relation entre l’image positive d’un produit et l’image de soi négative d’une personne qui achète pourtant le produit malgré l’inadéquation entre les deux images.

Ma démonstration touche six types de produits (biens ou services) : les parfums, les produits de luxe (croisières, hôtels réputés, vêtements griffés, etc.), les objets d’art, les sorties au restaurant, les cosmétiques et les vêtements. Afin d’établir cette inadéquation compensatoire, il est indispensable de démontrer que l’image de ces produits est positive, ce que confirment trois faits.

Premièrement, ceux qui mentionnent ces produits les jugent représentatifs d’eux-mêmes; qualifier de représentatifs des produits dont l’image est négative irait à l’encontre du principe de valorisation de l’image de soi. Deuxièmement, les principaux symbolismes liés à ces produits sont tous positifs. Troisièmement, la consommation de ces produits engendre des émotions positives, par exemple le sentiment de bien-être évoqué par toutes les personnes interviewées. Par ailleurs, l’image de soi des personnes en question est négative, comme le démontre leur faible estime de soi.

Par conséquent, selon Sirgy, la relation entre l’image (positive) de ces produits et l’image de soi (négative) de ces personnes est un exemple d’inadéquation positive. Il devrait en résulter que les unes n’achètent pas les autres puisque l’inadéquation entre leurs images respectives engendre un conflit. Tel n’est pourtant pas le cas, tout au contraire, car ces personnes achètent bel et bien ces produits. Je vois dans ce phénomène une forme de compensation; par leur consommation, ces personnes veulent exprimer quelque chose de positif au sujet de leur image, projeter une idée plus positive d’elles-mêmes. Cet exemple montre donc des relations d’inadéquation compensatoire.

Cette affirmation est étayée par l’existence de différences importantes entre les personnes dont l’estime de soi est faible ou très faible et celles dont l’estime de soi est forte ou très forte. Ainsi, une analyse du niveau de consommation révèle que 60% des personnes dont l’estime de soi est très faible considèrent qu’elles consomment plus que la plupart des gens; cette proportion est de seulement 24% pour celles dont l’estime de soi est très forte. Des écarts importants existent également au chapitre du caractère représentatif des produits. Ainsi, 80% des personnes dont l’estime de soi est très faible mentionnent les parfums comme des produits représentatifs d’elles-mêmes contre 38,5% de celles dont l’estime de soi est très forte; cette différence se maintient pour la catégorie des produits de luxe (66,7% contre 38,3%), pour les objets d’art (60% contre 7,7%), pour les sorties au restaurant (40% contre 21,3 %) et pour les cosmétiques (71,4% contre 28,6%).

Ces résultats démontrent sans équivoque que la consommation dans son ensemble, en particulier celle des produits mentionnés, est beaucoup plus importante pour les personnes dont l’estime de soi est faible; dans leur cas, la consommation est, me semble-t-il, une forme de compensation.

dimanche 18 octobre 2009

Jeux MMORPG: temps virtuel mais sentiments réels

Il y a quelques années, afin de me familiariser avec le concept des jeux MMORPG, j’ai brièvement utilisé le jeu Everquest II; je jouais en compagnie de Danièle avec qui je vis un bonheur idyllique depuis plus de vingt ans. Je vous présente tout d’abord nos personnages. Puisque nous les trouvions appropriés au monde fantaisiste d’Everquest, nous aurions tous deux aimé choisir le nom d’un personnage de la mythologie grecque, mais d’autres y avaient pensé avant nous. Nous nous sommes rabattus sur des noms de l’histoire ancienne : pour Danièle, Atheas, roi de Scythes aux 4e et 5e siècles avant Jésus-Christ, et pour moi, Hippias, tyran d’Athènes au 6e siècle avant Jésus-Christ, deux noms dont la consonance nous convenait. Danièle et moi avons choisi des personnages qui nous ressemblaient sur les plans du physique et de la personnalité. Jolie, plutôt menue et à la peau dorée, Atheas est un Elfe des bois, un être réputé pour son charme et sa disposition amicale; Prêtresse et Shamane Mystique, elle possède de puissants dons de protection et de guérison. Grand, mince et de teint pâle, Hippias est un Érudit, un être cultivé et curieux, constamment à la recherche nouveaux savoirs ésotériques; Mage et Conjurateur Invocateur, il est capable d’invoquer des êtres puissants issus des éléments pour le défendre ou attaquer ses adversaires.

Voici les constats que je tire de notre expérience commune de jeu. En tout premier lieu, j’ai noté sans surprise le fait que le jeu en ligne, comme celui sur console ou sur ordinateur, fait perdre la notion de temps au joueur captivé par le déroulement de l’action; ceci est d’ailleurs confirmé par une étude récente réalisée par des chercheurs de l’Université Laval (S, Tobin et S. Grondin, «Video games and the perception of very long durations by adolescents», Computers in Human Behavior, Volume 25, Issue 2, March 2009, Pages 554-559.). C’est un peu comme si dans un monde virtuel, le temps devient lui aussi virtuel. J’aimerais vous faire part d’un autre constat, sur le plan personnel cette fois; au préalable, vous devez cependant savoir que Danièle et moi sommes très unis et attentifs l’un envers l’autre, ce que pourront vous confirmer ceux qui nous connaissent bien. Mon constat est à l’effet d’avoir remarqué la transposition de nos attitudes et nos sentiments du monde réel au monde virtuel. Danièle m’a confié avoir remarqué la même chose. Ainsi, je tenais dans le monde Everquest le rôle de protecteur qui est le mien dans la vie courante; sans nouvelle de Danièle, je m’inquiétais, et si celle-ci était menacée j’utilisais mes pouvoirs pour la sortir de ce mauvais pas sans considération pour ma propre sécurité. Ce rôle de chevalier servant m’a bien sûr valu quelques plaies et bosses et même un décès prématuré.

Je ne prétends pas que les comportements que je viens de décrire sont généralisés dans les jeux de rôle en ligne; je rapporte simplement fidèlement notre expérience. Danièle et moi sommes peut-être trop rationnels pour ce type de jeu virtuel, étant incapables de nous défaire, même provisoirement et même dans un jeu, des sentiments qui sont nôtres? Par ailleurs, n’ayant fréquenté Everquest que peu de temps, je ne suis pas à même de décrire avec force détails les interactions avec les autres joueurs; néanmoins, pour avoir tenté à quelques reprises d’initier un contact avec d’autres joueurs j’ai constaté que ces personnes semblaient plus soucieuses de mener à bien leurs quêtes personnelles plutôt qu’à amorcer une collaboration. Là encore, je ne prétends pas que ce comportement soit généralisé; en fait, peut-être que ce comportement est normal aux étapes initiales du jeu, les quêtes complexes nécessitant un effort de groupe ne venant que plus tard. Il est également possible que mes tentatives de contact ne respectassent pas l’étiquette du jeu.

dimanche 11 octobre 2009

De la société de consommation à la société d’hyperconsommation

La technologie améliore la vie de tous les jours en produisant des objets de consommation utiles, plusieurs diront indispensables. Pensons à la facilité qui est nôtre quand il s’agit de laver la vaisselle ou les vêtements; des machines, au cœur desquelles se trouvent des microprocesseurs programmables à l’aide de quelques touches, se chargent d’exécuter pour nous des tâches que nos grands-mères mettaient des heures à exécuter. N’en déplaise à certains, le confort matériel n’est ni une tare ni une honte; il fait partie des petits plaisirs de la vie. Le phénomène est universel; lorsqu’un pays devient économiquement plus riche, on voit tout de suite sa population se tourner vers la consommation de toutes sortes de produits et services qui agrémentent l’existence. Ce qui est mauvais, ce n’est non pas la consommation en soi, mais les excès de la consommation, qui nous ont conduits à une société d’hyperconsommation; ces excès, on les constate tant chez les consommateurs que chez les producteurs.

Dans le livre Consommation et technologie qui sera publié prochainement, vous découvrirez quels sont ces excès et comment la technologie a contribué à l’essor de la société d’hyperconsommation.

dimanche 27 septembre 2009

Clarification de la notion de Web 2.0

Le jeudi 24 septembre, pendant ma chronique sur la consommation à Radio Ville-Marie, l’animateur Michel Gailloux m’a demandé de clarifier la notion de Web 2.0 pour les auditeurs. Contrairement à ce que son nom peut évoquer, le Web 2.0 n’est pas une évolution technologique de l’Internet, un peu comme la version 2.0 d’un logiciel est plus avancée que la version 1.0, le Web 2.0, c’est plutôt un changement dans la façon d’envisager le Web et dans les pratiques qui y ont cours.

De sa mise en place dans les années 1980 jusqu’à la fin des années 1990, le Web, sous-entendu 1.0, a été utilisé de trois façons : 1. une communication entre deux personnes par le biais du mail ou courrier électronique; 2. une communication entre les membres d’un groupe par le biais de la messagerie électronique ou du forum de discussion; 3. une de communication de masse par le biais d’un site Web non interactif.

C’est Darcy DiNucci qui annonce le changement de paradigme, utilisant pour la première fois le vocable « Web 2.0 » dans un article publié en 1999 : « Le Web tel que nous le connaissons maintenant, qui télécharge dans la fenêtre d’un navigateur des écrans essentiellement statiques, n'est qu'un embryon du Web à venir. Les premiers miroitements du Web 2.0 commencent à apparaître, et nous commençons tout juste à voir comment cet embryon pourrait se développer [...] Le Web sera compris non pas comme des écrans chargés de texte et de graphiques, mais comme un mécanisme de transport, l'éther par lequel est générée l'interactivité. »

DiNucci définissait alors le principe même du réseau social, c’est-à-dire une toile complexe d’interactions reflétant les intérêts des internautes, les véritables propriétaires de l’Internet; rappelons que le Web a été pensé et créé pour favoriser les échanges d’idées et de contenus, entre des chercheurs d’abord, entre les membres d’une communauté élargie à toute la planète ensuite.

Le Web social, ce n’est donc pas un usage du Web, mais plutôt toute une série d’applications qui permettent aux gens d’interagir et de diffuser des contenus sur le Web; parmi celles-ci, on retrouve entre autres le blog et le site de réseautage social.

Le blog, est une page Web interactive mise à jour régulièrement, en principe, par son ou ses auteurs, les billets, articles ou chroniques apparaissant dans l’ordre inverse de leur publication. En 1997, « Jorn Barger, auteur du site Robot Wisdom, crée le terme “weblogs” pour décrire ce que lui et d’autres pionniers de l’Internet font sur leurs sites. » En 1999, « Peter Merholz, auteur du weblog Peterme, annonce qu’il prononcera désormais le mot “weblog” comme “we blog” [nous bloggons], qui est inévitablement raccourci au mot “blog” dont l’auteur est appelé un “blogger” [blogueur]. » En août 1999, Google lance Blogger, la première application en ligne, faisant du blog une pratique grand public. C’est un tournant, car, jusqu’alors, la publication de contenus sur le Web était une pratique réservée à des sociétés et quelques initiés.

Le site de réseautage social, ou SNS (de l’anglais Social Networking Service), est un concept que Boyd et Ellison définissent comme des « services Web qui permettent aux individus (1) de construire un profil public ou semi-public dans un système délimité, (2) de créer une liste d'autres utilisateurs avec lesquels ils partagent une connexion, et (3) d’afficher et de parcourir leur liste des connexions et celles produites par d'autres au sein du système. » Le premier réseau social à apparaître sur le Web est SixDegrees.com. Lancé en 1997, il est acheté pour la somme de 125 millions $ÉU par YouthStream Media Networks en 2000 qui en cesse l’exploitation avant la fin de la même année; l’entreprise revend la technologie en 2003 pour la somme de 700 000 $ÉU.

Vous pourrez en découvrir davantage sur le Web 2.0 et sur biens d’autres technologies dans l’ouvrage Consommation et technologie qui sera publié fin octobre ou début novembre.

samedi 19 septembre 2009

Les origines de l’ordinateur numérique

La rédaction de l’ouvrage Consommation et technologie est maintenant terminée; le livre sera publié cet automne avant le Salon du livre de Montréal. J’ai donc maintenant un peu plus de temps à consacrer aux chroniques de mon blog; j’espère pouvoir les reprendre de façon un peu plus régulière.

Dans ma dernière chronique régulière, le dimanche 19 juillet, j’ai commencé à vous parler des origines de l’ordinateur en présentant le calculateur analogique. Poursuivons avec aujourd’hui avec l’ordinateur numérique.

C’est à l’ENIAC (Electronic Numerical Integrator And Computer) que l’on attribue la plupart du temps l’honneur d’être le premier ordinateur numérique, électronique et programmable. Conçu par les ingénieurs John Mauchly et Presper Eckert assistés du mathématicien John von Neumann, ce monstre de 30 tonnes utilisait 18 000 lampes à vide; sa conception était financée par l’armée américaine qui souhaitait l’utiliser pour calculer des tables de tir balistiques (P. Breton et S. Proulx, L’Explosion de la communication, La naissance d’une nouvelle idéologie, 3e édition, Montréal, Les éditions du Boréal, 1994, p. 87). Les deux ingénieurs quitteront l’Université de Pennsylvanie et s’associeront pour fonder la corporation Eckert-Mauchly Computer; faute de fonds suffisants, cette entreprise n’arrivera pas à exploiter commercialement les concepts développés avec ENIAC. C’est à la compagnie Remington Rand que revient l’honneur de produire le premier ordinateur commercial; l’entreprise acquiert Eckert-Mauchly Computer en 1950 et produit ensuite la première gamme d’ordinateurs conçus pour des applications d’affaires, la série UNIVAC.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la compagnie IBM travaille elle aussi à la conception d’un ordinateur en collaboration avec l’Université Harvard. En 1946 elle produit le Mark I, un ordinateur d’une taille beaucoup plus petite; il ne pèse que 5 tonnes. À peu près au même moment que Remington Rand, en 1952, IBM lance elle aussi un ordinateur commercial, l’IBM 701.

Ces événements marquent le début d'une révolution numérique qui transformera les méthodes de production et de gestion des entreprises avant de s'étendre à la sphère privée puis de tisser autour de la planète un réseau de communication qui a permis l'émergence des réseaux sociaux en ligne que nous connaissons aujourd'hui. Dans le livre que je vous présenterai bientôt, j'explore les différentes facettes de cette transformation majeure de notre monde.

lundi 20 juillet 2009

Marche sur la Lune d’Apollo 11, un bond de géant pour l’Humanité

Ceci n’est pas une chronique régulière, elle ne suit donc pas celle publiée hier. Son but est de célébrer le 40e anniversaire du premier pas de l'Humanité sur la Lune et d'inspirer toutes les générations à imiter cet exemple.

Je me souviendrai toujours de l’endroit où j’étais à 22H56 HAE le 20 juillet 1969. Âgé de seulement 18 ans à l'époque, je venais de terminer mon quart travail de soir comme sauveteur (maître-nageur) aux piscines de l’île Sainte-Hélène. Avec quelques amis, j’ai marché jusqu’à l’exposition Terre des Hommes qui a suivi EXPO 67. Sur l'île Notre-Dame, entre les pavillons français et britannique, les autorités de l’exposition avaient érigé un écran géant pour permettre aux visiteurs d'assister en direct aux premiers pas de l'Humanité sur la Lune.

Une pensée m’a alors frappé; une génération 20 ans plus jeune avait amené l'Humanité sur la Lune. J'ai été submergé par le sentiment de faire partie d’une nouvelle génération, les baby-boomers, pour laquelle les limites n’existaient pas. Je suis fier d'être issu d'une génération qui avait, et a encore, qui avait le sentiment de pouvoir tout faire et par-dessus tout, la volonté de le faire.

Oui il y a des problèmes dans notre monde d'aujourd'hui, mais il y avait aussi des problèmes dans le monde d’alors, la guerre du Vietnam et l'épée nucléaire de Damoclès de la guerre froide pour ne citer que ces deux-là. Nous avons surmonté ces problèmes, non pas parce que nous avons eu de la chance, non pas parce que nous étions plus intelligents, mais parce que nous n'avons jamais abandonné. Défi est un autre mot pour problème. Nous avons notre créativité, nous avons le savoir-faire, nous disposons de la technologie, et ce que nous n'avons pas, nous pouvons l’inventer. Qu’attendez-vous, faites-le, et ne cessez pas d'essayer jusqu'à ce que vous ayez réussi ou soyez décédé.

dimanche 19 juillet 2009

Les origines de l’ordinateur, le calculateur analogique

Absorbé par mon prochain livre, Consommation et technologie, dont la sortie est prévue à l'automne, par mon microblog quotidien sur Twitter et par d'autres activités de publication, entre autres d’un article intitulé « Le luxe de 1950 à 2020 : une nouvelle géoéconomie des acteurs » dans la revue GÉOÉCONOMIE, je dois espacer les chroniques de mon blog, car le temps me manque. Je vous prie de m’en excuser.

Contrairement à ce que j'écrivais à la fin de ma dernière chronique, celle-ci ne sera pas consacrée au développement technologique de l’arme aérienne aux États-Unis, car la poursuite d’une série telle celle consacrée aux technologies de guerre, commencée le 6 juin, doit se faire de façon plus soutenue; je dois donc l’interrompre. Je la reprendrai peut-être un jour.

Aujourd’hui, je vous donnerai un aperçu du contenu de mon prochain livre, en vous parlant des origines de l’ordinateur. On en compte deux types bien différents : analogique et numérique. Commençons par l’ordinateur analogique.

Il s’agit d’un dispositif mécanique de gestion de données « qui s'expriment au moyen de grandeurs physiques (par exemple, des intensités, des tensions ou des pressions hydrauliques) », dont les rouages sont entraînés par moteurs électriques ou des pistons hydrauliques. L’abaque chinois et la règle à calcul autrefois utilisée par les ingénieurs sont des exemples d’« ordinateurs » analogiques actionnés manuellement. C’est Vannevar Bush, un professeur du Massachusetts Institute of Technology, qui, en 1931, met au point le premier ordinateur analogique fonctionnel, qu’il appelle alors « continuous integraph »; on lui donnera plus tard le nom d’« analyseur différentiel ».

L’« analyseur différentiel » est une machine gigantesque qui utilise les dix chiffres du système décimal plutôt que le système binaire des ordinateurs actuels; c’est d'ailleurs un étudiant de Bush, Claude Shannon, qui suggère dans son mémoire de maîtrise l’application pratique de l’algèbre booléenne et de l’arithmétique binaire à des circuits électriques, son travail sur l’« analyseur différentiel » l’ayant amené à rechercher des façons de l’améliorer, entre autres en remplaçant les rouages par des circuits électriques.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, le viseur Norden qui équipe les bombardiers de l’USAF utilise un ordinateur analogique pour calculer le point d’impact des bombes. Jusque dans les années 1960, peut-être même 1970, les banques ont utilisé des calculatrices électromécaniques faisant appel au concept d’ordinateur analogique développé par Bush. Des machines numériques ont par la suite relégué ces premiers ordinateurs aux oubliettes de l’histoire.

Bush est néanmoins un visionnaire. Dans l’article « As we may think », publié en 1945 dans la revue « The Atlantic », il prévoit la dominance des ordinateurs numériques et programmables sur leurs cousins analogiques : « Les machines arithmétiques avancées du futur seront de nature électrique et opéreront à des vitesses 100 fois supérieures, ou même plus, aux vitesses courantes […] elles sélectionneront leurs propres données et les manipuleront en fonction des instructions insérées. » Bush reconnaît donc les avantages des calculateurs numériques et des langages de programmation développés pendant la Seconde Guerre mondiale.

Dans ma prochaine chronique, je poursuivrai avec les ordinateurs numériques.

dimanche 28 juin 2009

Les technologies de guerre : La Royal Air Force

1940 : le Blitzkrieg permet à Hitler de s'emparer de la France en 6 semaines. En mai, la France capitule et en juin le Corps Expéditionnaire Britannique se retire en désordre à Dunkerque, abandonnant la majeure partie de son matériel militaire. L'Angleterre se retrouve seule, mais, heureusement pour elle, dispose d'un atout de taille : la Royal Air Force (RAF - armée de l'air britannique).

Dans les années 1930, l’Angleterre est soucieuse de maintenir une force aérienne capable de défendre le royaume contre toute attaque venue du continent européen, sorte de parité aérienne. Elle met à profit l’expertise développée par les avionneurs à l’occasion des épreuves de la coupe Schneider : « Jacques Schneider, de la dynastie des maîtres de forge du Creusot, était de ceux qui, dans l’entre-deux-guerres, croyaient fermement à l’avenir de l’hydraviation. Convaincu que l’hydravion était l’appareil le mieux adapté aux voyages aériens au long cours, il chercha à en stimuler le développement au moyen d’une coupe qui demeurera le symbole d’une époque de l’histoire de l’aviation. La Coupe Schneider ne se contentera pas d’être à l’origine de la création d’appareils de légende, aux lignes superbes et aux performances éblouissantes, tels que le Bernard HV-220, le Macchi MC 72 ou le Supermarine S6. Elle contribuera puissamment au développement de progrès significatifs. Outre le développement des moteurs en V, elle imposera définitivement la formule du monoplan à aile basse pour les appareils rapides. Nul doute que l’expérience acquise par Reginald Mitchell et Henry Royce dans leur quête pour la Coupe Schneider leur aura été profitable pour la création d’un appareil qui fera parler de lui plus tard : le Supermarine Spitfire. » (Site Web Aerostories)

L’échec essuyé par la Luftwaffe (armée de l'air allemande) pendant la célèbre Bataille d’Angleterre, du 10 juillet au 31 octobre 1940, fait qu’Hitler renonce à un tenter assaut amphibie sur les côtes anglaises; l’excellence des avions de chasse anglais, l’Hurricane et le plus récent Spitfire, couplée au courage exceptionnel des pilotes de la RAF sauve l’Angleterre d’une invasion allemande. C’est d’ailleurs ce qui fit dire à Winston Churchill, Premier ministre d’alors, dans un discours prononcé à la chambre des communes le 20 août 1940 : « Never in the field of human conflict was so much owed by so many to so few - Jamais dans l’histoire des conflits humains une dette aussi grande a-t-elle été contractée par un si grand nombre de personnes envers aussi petit nombre d’individus. »

Dans ma prochaine chronique, je me pencherai sur le développement technologique de l’arme aérienne aux États-Unis.

dimanche 14 juin 2009

Les technologies de guerre : le Blitzkrieg

Si au sortir de la Première Guerre mondiale, la France victorieuse dispose d’une armée de l’air puissante, il n’en va pas autant en septembre 1939; des incohérences dans les politiques gouvernementales, une incompréhension de l’importance stratégique et tactique de l’aviation par le haut commandement et une insuffisance de la capacité de production des avionneurs nationaux empêchent la France de reconstruire une armée de l’air capable de faire face aux défis de l’époque (T. Vivier, La politique aéronautique militaire de la France, Janvier 1933 – Septembre 1939, Paris , L’Harmattan, 1997). L’avion de chasse le plus utilisé par l’armée de l’air française est le Morane-Saulnier 406, inférieur au Messerschmitt 109 allemand. Malgré leurs efforts héroïques, les aviateurs français sont incapables de s’opposer efficacement aux bombardements des avions d’assaut de la Luftwaffe (armée de l’air allemande), les tristement célèbres Stukas. C’est un des facteurs qui expliquent le succès du concept de « guerre éclair » (Blitzkrieg) mis au point par l’état-major d’Hitler : « La combinaison des bombardiers en piqué Stuka et des forces de Panzer [char de combat allemand] donna rapidement la victoire » (D. Mondey (dir. publ.), J. Liron, J.W. Dennison, K. Munson et P. Pletschacher pour l’édition originale 1977, A. Hérubel (dir. publ.) et J.A. Rabet pour l’adaptation française, Encyclopédie de l’aviation, Compagnie internationale du livre, 1980, p. 151). C’est ce qui permit l’invasion de la Pologne en un mois et plus tard celle de la France en six semaines.

« En vertu du traité de Versailles, il était interdit à l’Allemagne d’entretenir une force aérienne, mais elle avait droit à un ministère de la Défense et ce dernier comprenait un petit état-major de l’air. Les constructeurs allemands conçurent toute une gamme d’avions de ligne, d’entraînement et de liaison qui servirent plus tard de prototypes aux bombardiers, chasseurs et avions d’assaut. La compagnie aérienne nationale, la Lufthansa, dispensait l’entraînement aérien et l’esprit aéronautique était entretenu par les sports aériens : vol à voile et vol à moteur. Quand Hitler accéda au pouvoir en 1933, il lança un réarmement massif en commençant par la Luftwaffe » (Ibid., p. 150).

samedi 6 juin 2009

Les technologies de guerre : introduction

Nous célébrons aujourd’hui le 65e anniversaire du débarquement de Normandie (Jour J) qui marque le début de la reconquête de l'Europe par les pays alliés. Je crois qu'il est approprié, voire indispensable, d'avoir une pensée pour les milliers de femmes et d'hommes qui ont donné leur vie repousser l’envahisseur et de reconquérir les territoires occupés. C'est également pour moi l'opportunité d'entreprendre une série de chroniques portant sur les technologies de guerre. Commençons par un peu d'histoire.

La fin des années trente voit se résorber tranquillement la Grande dépression qui a sévi pendant toute une décennie. Les démocraties occidentales se concentrent sur les moyens à prendre pour faire redémarrer leurs économies respectives; elles visent donc avant tout à maintenir la paix en Europe et, pour ce faire, font preuve de tolérance envers Hitler. L’annexion de l’Autriche résultant de l’Anschluss de 1938 est un premier pas de l’Allemagne pour élargir les frontières imposées par le traité de Versailles qui a mis fin à la Première Guerre mondiale. Lors d’une conférence à Munich en septembre 1938, dans un effort d’apaisement du Führer allemand, les dirigeants français et anglais entérinent les accords de Munich qui concèdent à l’Allemagne l’annexion des monts Sudètes sur le territoire de la Tchécoslovaquie. Le 1er septembre 1939, l’Allemagne envahi la Pologne; deux jours plus tard, le Royaume-Uni, la France et d’autres pays lui déclarent la guerre. Elle durera six longues années et s’étendra à plusieurs continents et océans.

Comme tous les conflits, la Seconde Guerre mondiale a accéléré le développement technologique; les périodes de crise sont favorables aux nouvelles inventions, en partie parce que l’aiguillon de l’urgence favorise la créativité et aussi parce que les crédits accordés au développement technologique par les gouvernements sont alors, sinon illimités, du moins fortement augmentés. Je ne vais pas tenter de faire une énumération exhaustive de toutes les technologies de guerre. Pour ces chroniques, je retiens l’aviation et l’espace.

Je commencerai la semaine prochaine avec la période du Blitzkrieg, le concept de guerre éclair qui a permis à Hitler d’envahir toute l’Europe, puis l’Afrique.

samedi 30 mai 2009

Acheteurs méfiez-vous!

Ce que nous avions tous constaté dans les supermarchés nous a été confirmé par Statistique Canada; pour la période de 12 mois terminée en avril, le prix des aliments achetés en magasin a augmenté de façon importante. La hausse moyenne est de 8,3 %, mais cette statistique cache une autre réalité; le prix de certains aliments a augmenté beaucoup plus. C'est le cas des légumes frais (+26,0 %) et des fruits frais (+16,8 %), dont la consommation recommandée par Santé Canada se situe entre 7 et 10 portions par jour chez l'adulte. Pour ces produits, le consommateur doit absolument comparer les prix chez les divers marchands, car les écarts sont importants et les prix varient considérablement de semaine en semaine.

Le consommateur doit également être vigilant par rapport aux changements dans le format des produits, un phénomène qui se manifeste depuis quelques années, mais qui prend de l'ampleur me semble-t-il. Ainsi, j'ai récemment remarqué que le paquet grand format d'une barre de fromage d'une marque bien connue avait récemment diminué de 600 g à 500 g... pendant que son prix augmentait.

vendredi 1 mai 2009

Pourquoi abandonner la marque Pontiac?

Le 27 avril 2009, GM annonçait l’abandon de la marque Pontiac dans le cadre d’une restructuration destinée à réduire ses coûts. Cette décision est-elle judicieuse? Considérons quelques faits.

Pontiac est une grande et vieille marque à laquelle des millions de personnes étaient et sont toujours fidèles. Introduite en 1906 par la Pontiac Spring & Wagon Works, elle tire son nom du célèbre chef amérindien Pontiac (Obwandiyag, 1712-1769) qui a mené une rébellion contre l’occupation britannique des Grands Lacs (1763-1766).

Au fil des années sont apparues de nombreuses voitures qui se sont distinguées; pensons entre autres à la Star Chief toute en rondeurs (1955), à la Bonneville avec ses ailerons arrières (1959), à la célèbre Firebird (1967) introduite pour concurrencer la Ford Mustang, à la GTO (1969), à la Gran Am (1973), à la Trans Am (1985), descendante de la Firebird, et au coupé deux places Fiero (1985), pour ne mentionner que celles-là.

Je comprends la nécessité pour GM de réduire ses coûts; il en va de sa survie. Cependant, je crois que les mêmes économies pourraient être réalisées tout en conservant la marque Pontiac qui a une grande valeur non seulement sentimentale et culturelle, mais économique; en fait, si GM l’abandonne, je ne serais pas du tout surpris de voir des investisseurs proposer de la reprendre.

Le problème de Pontiac provient du dédoublement de plusieurs modèles avec la marque Chevrolet; ceci entraîne des coûts excédentaires autant pour la fabrication que pour la commercialisation. On pourrait facilement réduire ces coûts en éliminant les modèles Pontiac pour lesquels il existe déjà un modèle Chevrolet correspondant; ceci réduirait les coûts de fabrication. Par ailleurs, la vente des gammes Chevrolet et Pontiac, maintenant complémentaires, pourrait être regroupée sous une seule bannière, réduisant ainsi les coûts de commercialisation.

Évidemment, les modèles Pontiac et Chevrolet devront être adaptés aux impératifs économiques et environnementaux actuels, et bien sûr aux attentes de la clientèle.

Êtes-vous un amateur de Pontiac? Le cas échéant, j’aimerais vraiment lire vos commentaires sur ce sujet.

mardi 21 avril 2009

L’image de marque des grandes villes : Montréal dans le monde

Ce matin, un fidèle lecteur des chroniques de mon blog m’a reproché, avec raison, l’absence de chroniques ces derniers temps; plutôt que d’expliquer pourquoi il en est ainsi, je vais réparer ce manque en publiant quelques extraits du chapitre « L’image de marque des grandes villes : Montréal dans le monde » de l’ouvrage collectif Montréal, aujourd’hui et demain, réalisé sous la direction de Pierre Delorme; ce livre sera publié le 28 avril aux éditions Liber.

L’image de marque d’une organisation, fût-elle une entreprise multinationale, une petite entreprise, une université, une région, un pays, est d’une importance capitale. Pour une ville comme Montréal, cette image exerce une influence déterminante sur plusieurs plans, par exemple, dans le choix d’une destination touristique, d’un lieu de résidence ou de l’implantation d’un commerce, d’une filiale ou d’une usine.

Philip Kotler, une sommité dans le domaine du marketing, la caractérise ainsi : «L’ensemble des croyances, des idées et des opinions qu’on se fait d’un objet. Les attitudes et les actions à l’égard d’un objet sont fortement conditionnées par l’image de cet objet » (P. Kotler, Marketing Management, Upper Saddle River, Prentice Hall, 2000, p. 553). Cette définition met déjà en évidence deux éléments fondamentaux de l’image. En premier lieu, le fait que l’image d’un objet est fonction des perceptions plutôt que d’une réalité parfaitement objective. En deuxième lieu, le fait que la perception d’un objet exerce une influence considérable sur les sentiments et les comportements à son endroit.

L’image de Montréal n’est pas mauvaise; à preuve, elle se positionne au 13e rang du classement général de 2006 de l’Anholt City Brands Index. Elle n’est cependant pas très excitante, malgré ce qu’en dit la publicité ; considérons le Guide touristique officiel 2007-2008. Sur la page couverture on trouve le nom «Montréal», dans lequel le « o » a été remplacé par des lèvres pulpeuses d’un rouge vif. Au-dessus de ce graphisme, on lit « à la »; ce slogan, « à la Montréal », se veut un clin d’oeil à une expression bien connue dans le monde culinaire, par exemple « ratatouille à la provençale », « canard à la rouennaise ».
D’inspiration française, cet « à la » vient également appuyer le statut, revendiqué par certains, de « deuxième ville francophone après Paris », une prétention qui, comme nous l’avons vu, ne fait pas partie de l’image actuelle de Montréal à l’échelle internationale [selon l’Anholt City Brands Index].

Cette « signature », ce logo en quelque sorte, vise aussi à différencier Montréal. D’une part, on laisse supposer que les activités que l’on y propose sont « à la manière », sous-entendu « exclusive », de Montréal. D’autre part, on fait explicitement référence à la sensualité en utilisant un symbole très évocateur. À l’occasion d’une rencontre, de hauts dirigeants de Tourisme Montréal nous ont confié que cette « marque de commerce » avait pour but d’évoquer la passion qui anime Montréal.

Par exemple, à la page 4 du guide, le casino de Montréal annonce : « Bienvenue au Casino… passionnément ». Nous voulons bien croire que ces messages publicitaires puissent attirer quelques touristes de Toronto ou de Boston en quête d’un week-end distrayant, encore que Montréal ne soit pas au nombre des dix premières villes les plus accueillantes, les plus belles ou les plus excitantes. Même en supposant qu’elles soient efficaces, ces communications sont insuffisantes pour construire une image de marque permettant à Montréal de se distinguer; ces messages ne sont destinés qu’à vendre des produits, hôtels, bars, restaurants, spectacles et autres activités touristiques. La construction de l’image requiert bien plus. Les décisions politiques et administratives ont un impact important sur l’image d’une ville. Or des décisions prises ces dix dernières années vont à l’encontre du développement d’une image internationale pour Montréal.

Par exemple, ce qui aurait pu être un élément stratégique fondamental sur lequel construire une nouvelle image pour Montréal est sans conteste le projet « une île, une ville », une idée originale du maire Jean Drapeau dans les années 1960, reprise et défendue par le maire Pierre Bourque dans les années 1990, puis concrétisée par les fusions municipales de 2002. Malheureusement, en 2004, à la suite d’une promesse électorale opportuniste, des référendums ont mené à la transformation de Montréal en un espace balkanisé de petits fiefs. Sans compter les municipalités défusionnées, donc autonomes, dont certaines s’apparentent davantage à des villages, les arrondissements de Montréal sont désormais eux aussi gérés comme autant de villes autonomes par autant de petits seigneurs préservant jalousement leurs pouvoirs, les maires d’arrondissement.

dimanche 22 mars 2009

Une formule mathématique à l’origine de la crise

Je l’ai écrit dans ma chronique du 25 novembre 2008, « L’éclatement de la bulle de consommation », la crise mondiale actuelle est attribuable à un endettement excessif du consommateur, une conséquence de l’hyperconsommation. Cela dit, pour qu’il y ait des emprunteurs, il doit y avoir également des prêteurs; la cupidité de ces derniers a fortement contribué à exacerber la crise.

Sur le plan financier, c’est le marché obligataire qui est à l’origine de la crise financière. Il faut bien comprendre que le rendement des obligations, comme celui de tous les produits financiers d’ailleurs, est fonction du risque; plus le risque de défaut de l’emprunteur est élevé, plus l’intérêt qu’on exigera de lui est élevé. Ce risque, on l’évalue à l’aide d’une échelle de notation. Pour illustrer mon propos, voici celle de Standard & Poor : AAA, AA, A, BBB, BB, B, CCC, CC, C, D. Une obligation obtenant une note inférieure à BBB est considérée un produit financier spéculatif, donc fortement risqué; son rendement est toutefois beaucoup plus élevé que celui d’une obligation notée AAA.

Par exemple, les Bons du trésor du Canada sont notés AAA, mais leur rendement est actuellement inférieur à 1%. À l’inverse, DBRS a récemment attribué la note BB à certains certificats hypothécaires de Citigroup.

Or, si l’attribution de la note a historiquement été fonction de critères objectifs, telles la garantie du gouvernement du Canada ou encore les données réelles des défauts de paiement, David X. Li, un statisticien gradué de l’Université de Waterloo, a conçu un modèle mathématique pour évaluer le risque plus rapidement et plus facilement. Sa formule est fondée sur la corrélation entre différents véhicules financiers afin d’en évaluer le risque mathématique de défaut; elle a permis d’attribuer la note AAA à un nouveau produit financier, le « collaterized debt obligation » (CDO) ou « obligation adossée à des actifs », tel le maintenant tristement célèbre Papier commercial adossé à des actifs (PCAA), acheté par plusieurs banques et par la Caisse de dépôt du Québec, dont la valeur a fondu comme neige au soleil.

Sans entrer dans les détails trop techniques, voici comment fonctionne la formule de David X. Li. Elle calcule la corrélation qui existe entre différents actifs financiers, souvent des « credit default swaps » (CDS), un produit dérivé financier destiné à protéger un investisseur contre un défaut de paiement. Plutôt que d’utiliser les données réelles des défauts de paiement, la formule de Li utilise l’historique du prix des « swaps » (CDS), facilitant et accélérant l’analyse de risque.

Forts de cette connaissance, même si cette dernière était superficielle, les organismes financiers se sont empressés de regrouper au sein d’une même obligation adossée à des actifs, des « swaps » (CDS) entre lesquels la corrélation était négative. Par exemple, des hypothèques provenant de régions très différentes, tels le Québec et la Colombie-Britannique. Leur raisonnement était le suivant : les chances que le marché hypothécaire s’écroule simultanément dans ces deux régions sont très petites, donc l’obligation résultante est sécuritaire.

Comme nous le constatons maintenant, de tenir pour acquise la permanence de la corrélation négative était une fausse prémisse qui faisait croire à une conséquence tout aussi erronée, la grande sécurité de l’obligation résultante.

Ceci a eu pour résultat d’attribuer la note AAA, une note historiquement attribuée à des placements garantis par le gouvernement, à des obligations adossées à des actifs corporatifs, à des prêts bancaires ou à des titres hypothécaires, sans que la valeur réelle et la sécurité de ces actifs soient vraiment vérifiées et démontrées.

L’astuce a bien fonctionné pendant quelques années, faisant augmenter le marché des « swaps » (CDS) de 920 $ milliards en 2001 à 62 $ trillions en 2007. Quant à celui des obligations adossées à des actifs, il est passé de 275 $ milliards en 2000 à 4,7 $ trillions en 2006.

Deux facteurs ont perturbé le modèle : une augmentation phénoménale du prix des maisons et le fait que les données concernant l’historique du prix des « swaps » (CDS) étaient réparties sur une période beaucoup trop courte, seulement 10 ans. Même si en 2005 plusieurs personnes ont formulé des mises en garde sur l’utilisation de cette formule mathématique, dont David X. Li lui-même, la plupart des grands investisseurs n’ont pas écouté, séduits par les profits mirobolants qu’ils récoltaient à l’époque.

Les leçons à tirer de cet épisode sont très simples :

  • Dans le monde de la finance, il n’y a pas de profit élevé sans risque élevé; si le rendement vous paraît trop beau pour être vrai, c’est qu’il y a anguille sous roche.
  • Très peu de financiers comprenaient la formule de David X Li; quelques-uns se sont abstenus d’acheter les produits financiers qui en résultaient, mais la plupart en ont acheté sans comprendre. Si vous ne comprenez pas ce dans quoi vous investissez, abstenez-vous! Il n’y a pas de honte à avouer les limites de ses connaissances, surtout dans des spécialités aussi pointues.

Je conclus en répétant ce que je dis depuis longtemps déjà : le capitalisme doit être réformé. On doit en évacuer la spéculation et les autres pratiques fondées sur la cupidité, la recherche rapide et excessive du profit.

Les personnes qui souhaitent obtenir plus de détails techniques sur ce sujet peuvent consulter l’article « Recipe for Disaster: The Formula That Killed Wall Street », qui a inspiré cette chronique.

Je remercie mon ami Serge Lamarche, conseiller financier à la Financière Banque Nationale, de sa précieuse collaboration pour la rédaction de cet article.

mardi 10 février 2009

La technologie et la société de consommation

À l’automne 2009, je publierai le troisième ouvrage de mon anthologie sur la consommation, initialement prévu pour l’hiver 2009. Dans le premier, Consommation et image de soi, publié en 2005, je me penche sur le lien entre l’image des produits et l’image de soi et sur le rôle compensatoire que joue la consommation pour certaines personnes dont l’estime de soi est faible. J’initie également l’étude de l’acte de consommer, non plus en fonction de besoins innés, une approche aussi fausse que stérile, mais en fonction d’attentes précises qu’a le consommateur vis-à-vis des produits qu’il possède ou souhaite acquérir. Le second, Consommation et luxe, publié en 2007, explique pourquoi nous assistons à une montée du luxe dans les sociétés occidentales et démontre en quoi cette quête du luxe est chimérique, et dans bien des cas dévastatrice, tout autant pour le consommateur en quête de bonheur que pour le producteur qui se laisse séduire par des marges de profit, alléchantes certes, mais trop souvent illusoires. J’y complète la théorisation des attentes que j’organise en dix catégories bien distinctes en fonction des tendances lourdes observées, en particulier celles ayant trait aux produits de luxe. Dans le troisième ouvrage, Consommation et technologie, j’analyse l’impact de la technologie sur l’évolution de nos sociétés, en particulier sur son rôle dans l’émergence d’une société qu’il est maintenant convenu de qualifier d’hyperconsommation.

Commençons par définir ce qu’est la technologie. L’Encyclopaedia Britannica la définit comme « l'application de la connaissance scientifique aux fins pratiques de l’existence humaine ou, comme il se dit parfois, à la modification et la manipulation de l'environnement humain. » Cette courte définition nous laisse deviner que, contrairement à ce qu’en pensent certains, la technologie n’est pas l’apanage de notre société moderne. Le développement technologique n’a pas attendu le XXIe siècle, ni même le XXe, pour faire son apparition; il y a 35 000 ans, l’homme de Cro-Magnon fabriquait des outils et des armes avec du silex, de l’os et d’autres matières premières et les utilisait pour assurer sa survie dans un environnement hostile.


En fait, quelle serait votre réponse si je vous demandais quelle est la plus grande invention de tous les temps? La réponse exacte est…le feu. « Le feu? », diront certains, plus éblouis par le plus récent iPhone que par une vulgaire allumette. Eh bien oui, car sans le feu, aucune des technologies que nous utilisons quotidiennement aujourd’hui n’aurait pu voir le jour. Toujours dans l’Encyclopaedia Britannica, on mentionne que le feu « est un des outils essentiels de la race humaine, dont la maîtrise a contribué à son cheminement vers la civilisation. » Découverte que l’on peut qualifier d’accidentelle, car de nombreux archéologues pensent qu’à l’époque de la préhistoire les premiers hommes ont d’abord utilisé un feu allumé par la foudre, puis appris à l’entretenir et le circonscrire. Les premières techniques rudimentaires pour démarrer un feu ne sont venues que plus tard : percussion d’un silex sur une marcassite, un minéral commun, et friction de deux morceaux de bois.

Le feu de bois a entre autres a minima permis à nos lointains ancêtres de se chauffer, donc de survivre à des températures plus basses et même de migrer vers des régions plus froides, de cuire ou sécher la nourriture, donc de la préserver, constituant ainsi des réserves pour les temps de disette ou pour des déplacements, à tenir en respect les animaux sauvages, donc de se protéger, et de s’éclairer, donc de prolonger le temps consacré au travail. Le feu a même été un instrument de socialisation, puisque « le "foyer" est un lieu où l'on se retrouve pour communiquer, parler, écouter, partager » (site Web Nethistoire).

dimanche 1 février 2009

Les taux d’intérêt sur les comptes CELI

Le vendredi 23 janvier 2009, dans la chronique « Le petit épargnant est-il moins important que l’investisseur? », je me penchais sur les taux d’intérêt consentis aux épargnants pour les comptes d’épargne. Aujourd’hui, je compare les taux d’intérêt payés par les six grandes banques canadiennes et deux banques étrangères opérant sur Internet au Canada, sur les comptes d’épargne libres d’impôts (CELI). Ce type de compte peut être ouvert comme un simple compte d’épargne, mais on peut également y placer des certificats de placement garantis (CPG), des obligations, des actions et d’autres types de placements. Mon analyse se limitera au compte d’épargne traditionnel et au CPG, pour un montant inférieur à 5000 $, sur un horizon de moins de 18 mois.
Sous réserve d’une erreur ou d’une omission toujours possible de ma part, les taux cités sont les plus élevés que j’ai pu trouver, vérifiés sur les sites Internet respectifs le dimanche 1er février 2009 avant 9h :

  • Banque CIBC (compte : 2,500 % - CPG 24 mois : 3,000 %)
  • Banque de Montréal (compte : 3,000 % - CPG 18 mois : 1,250 %)
  • Banque Nationale (compte : 0,250 % - CPG 24 mois : 1,600 %)
    Banque Royale (compte : 2,500 % - CPG 24 mois : 2,250 % [intérêts non composés annuellement])
  • Banque Scotia (compte : 2,600 % - CPG à taux ascendant 24 mois : 2,750 %)
  • Banque TD (compte : 2,500 % - CPG 1+1 24 mois : 2,989 % [rendement annuel réel])
  • Banque HSBC Direct (compte : 2,500 % - CPG : sans objet chez HSBC Direct car offert seulement dans les succursales HSBC selon mon interprétation des informations disponibles sur Internet)
  • Banque ING Direct (compte : 3,000 % - CPG 24 mois : 3,000 %)
Comme vous pouvez le constater, il existe des écarts importants entre les différents organismes financiers. En définitive, le choix d’un organisme financier plutôt qu’un autre peut reposer sur le rendement obtenu; lorsque l’écart entre plusieurs organismes est faible, votre confort avec l’organisme lui-même et la confiance que vous inspire le conseiller financier avec lequel vous transigez sont des éléments qui peuvent également guider votre choix.

vendredi 23 janvier 2009

Le petit épargnant est-il moins important que l’investisseur?

Dans l’article « Les banques réduiront-elles leurs dividendes? », publié dans le quotidien La Presse le mercredi 21 janvier, le journaliste Michel Girard fait état d’une augmentation importante du dividende payé par les banques à leurs actionnaires, exprimé en pourcentage de la valeur de leurs actions. Dopé par la chute brutale des titres bancaires, le rendement moyen s’établit maintenant à 7,1 % alors qu’il n’était que d’environ 3 % entre 1996 et 2007. À la question posée dans le titre de son article, le journaliste donne une piste de réponse : « À l’exception de la Banque Nationale, aucune de la bande des six n’a réduit son dividende dans le passé en dépit des crises antérieures ».
Voici le rendement du dividende payé par les banques canadiennes en date du lundi 19 janvier à la fermeture, tel que rapporté par le journaliste :
  • Banque de Montréal, 8,8 %
  • Banque Scotia, 6,5 %
  • Banque CIBC, 7,4 %
  • Banque Nationale, 7,6 %
  • Banque Royale, 6,0 %
  • Banque TD, 5,7 %
Considérons maintenant le taux d’intérêt payé par ces mêmes banques au petit épargnant qui leur confie ses économies (taux vérifiés sur les sites Internet respectifs le vendredi 23 janvier 2009 avant 9h, pour un dépôt inférieur à 5 000 $) :
  • Banque de Montréal, 0,75 % (compte d’épargne à taux Avantageux)
  • Banque Scotia, 1,0 % (compte d’épargne Maître CompteMD)
  • Banque CIBC, 0,2 % [0,45 % pour les jeunes] (compte d’épargne Croissance supérieure)
  • Banque Nationale, 1,0 % (compte Épargne-projet)
  • Banque Royale, 2,5 % (compte Épargne @intérêt élevé)
  • Banque TD, 0,05 % (compte d’épargne à intérêt progressif)
Sous réserve d’une erreur ou d’une omission toujours possible de ma part, les taux cités ci-dessus sont les plus élevés que j’ai pu trouver. En outre, sur certains comptes, plusieurs banques et les maisons de courtage qui leur sont associées paient un taux aussi bas que 0,1 %, voire de 0 % si le solde est inférieur à 5 000 $. Considérant les taux d’intérêt élevés imposés sur les soldes à découvert des comptes de chèque et des cartes de crédit, je crois que l'on peut affirmer que certains de ces taux sont scandaleusement faibles.
Je crois également que la réponse à la question que je pose dans le titre de ma chronique est évidente : pour la plupart des banques opérant en territoire canadien, le petit épargnant est négligé au profit de l’investisseur. L’argent que leur prêtent les petits épargnants n’a pas une valeur moindre que celui de l’investisseur particulier ou institutionnel; les banques peuvent à leur tour l’investir ou le prêter et obtenir des rendements beaucoup plus élevés.
Si je me fie aux informations que j’ai trouvées sur Internet, la seule grande Banque canadienne qui traite sa clientèle avec un peu plus d’égards sur le plan des intérêts payés sur les comptes d’épargne est la Banque Royale. Trois autres banques étrangères opérant sur Internet au Canada et offrant les mêmes garanties que les banques canadiennes sur les dépôts de 100 000 $ et moins méritent d’être également mentionnées : la Banque ING, la Banque HSBC et la Banque American Express. Voici les taux d’intérêt payés par ces trois banques sans égard au solde du compte :
  • Banque ING 2,7 %
  • Banque HSBC 2,5 % (plus 1 % en prime jusqu’au 16 mars 2009 sur les nouveaux dépôts)
  • Banque American Express 2,3 %
Vous savez maintenant ce que vous avez à faire avec vos épargnes.
La cupidité qui a mené à la crise ne me semble pas avoir disparu du milieu financier; on recherche y toujours le profit élevé et rapide à court terme. Le secteur des produits financiers est une jungle peuplée de prédateurs; je comprends pourquoi les gens ne font plus confiance aux conseillers financiers et pourquoi plusieurs personnes m’envoient des courriels pour obtenir un avis impartial.
Une dernière remarque : les taux d’intérêt indiqués sont pour les comptes d’épargne seulement. Ceux consentis sur d’autres types de comptes, le compte d’épargne libre d’impôt (CELI), le compte enregistré d’épargne retraite (REER) et le certificat de placement garanti (CPG) par exemple, sont différents de celui des comptes d’épargne. Je me pencherai sur ces questions dans de prochaines chroniques.

jeudi 15 janvier 2009

2009 : l’année de l’essentiel

Le lundi 12 janvier, j’ai commenté le sondage « Impact de la crise sur les Québécois », réalisé par Léger Marketing pour le Journal de Montréal et le Groupe TVA. Vous pouvez prendre connaissance de mes commentaires dans l'article « Les Québécois vont aller à l'essentiel » du journaliste Fabrice De Pierrebourg, publié dans le Journal de Montréal, et dans une entrevue télévisée à l'émission « Franchement Martineau » sur le réseau TVA-LCN.

mardi 6 janvier 2009

Pourquoi la crise n’est pas catastrophique

Lors de mon passage à l’émission « Christiane Charrette » le mardi 6 janvier 2009, l’un de mes premiers commentaires fut d’affirmer que la situation actuelle n’était pas catastrophique. Permettez-moi d’expliquer un peu cette prise position.

Ne nous le cachons pas, la crise actuelle est sérieuse; nos gouvernements devront prendre des actions en conséquence très rapidement, un point sur lequel je reviendrai un peu plus loin. Nous devrons tous également être réfléchis et responsables dans notre consommation.

Cependant s’il faut éviter de minimiser la crise, il ne faut pas non plus l’exagérer. La récession et la dépression ont tout autant des causes psychologiques qu’économiques; il serait irresponsable d’inquiéter encore davantage les Canadiens, quand déjà deux personnes sur trois sont pessimistes quant à leur avenir.

Or, en particulier au Canada, la crise n’est pas catastrophique, ni sur le plan financier, ni sur le plan économique.

Sur le plan financier, si la plupart des grandes entreprises ont vu fondre le cours de leur action en bourse, ceci n’affecte en rien la capacité de production de ces dernières, à la condition de pouvoir financer leurs projets de développement. À preuve, Bombardier Transport annonçait hier un contrat de 2,4 milliards avec la Deutsche Bahn, la société allemande des chemins de fer. C’est exactement là le genre d’activité commerciale favorable à l’économie canadienne, dont je parlais récemment dans la chronique « Le produit intérieur brut et la consommation ». Par ailleurs, même si plusieurs d’entre elles ont subi des pertes à cause du papier commercial fondé sur des hypothèques à risque, aucune des grandes banques canadiennes n’est en danger; elles sont toutes en excellente santé financière.

Sur le plan économique, la consommation ralentit, mais c’est à mon avis une bonne chose, car les économies des pays industrialisés ne peuvent plus dépendre de la consommation intérieure dans une aussi grande proportion (62 % au Canada et 71 % aux États-Unis en 2007). C’est également une bonne chose, parce que le niveau d’endettement est beaucoup trop élevé et celui de l’épargne quasi nul. Je ne préconise pas un arrêt brutal de la consommation; ce serait de toute façon utopique. Cependant, je crois que les gens devraient acheter d’une façon plus réfléchie, en fonction de leur capacité financière. Tant du côté du consommateur que de celui du producteur, on doit briser le cercle vicieux de l’escalade du luxe, sujet de mon dernier ouvrage « Consommation et luxe ».

Voici quelques stratégies que devraient adopter nos gouvernements pour résorber la crise :

  • Maintenir l’accessibilité au crédit, en particulier pour assurer le développement des entreprises.
  • Dans une moindre mesure maintenir également l’accessibilité au crédit, surtout pour la consommation de produits durables, pour les personnes dont le taux d’endettement n’est pas déjà trop élevé.
  • Générer de l’activité économique et créer de l’emploi à travers d’importants travaux d’infrastructure.
  • Encourager l’épargne par des programmes comme le CELI.
  • Favoriser le maintien d’un niveau de consommation correspondant à 50 à 55 % du produit intérieur brut, plutôt que le 62 % qu’elle représente actuellement au Canada.

samedi 3 janvier 2009

Ouverture des commerces le 2 janvier : une absurdité

Je ne comprends pas que le gouvernement ait acquiescé à la demande de certains intervenants du commerce de détail visant l’ouverture des magasins le 2 janvier; même si les objectifs sont légitimes de part et d’autre, relancer l’économie pour le gouvernement et augmenter les revenus dans le second cas, l’action retenue est inefficace au mieux. Commençons par les détaillants.

Même s’il est vrai que ces derniers ont engrangé hier des revenus supplémentaires, ils n’ont rien gagné; bien au contraire, ils ont perdu. Je m’explique.

Sauf à s’endetter davantage, un point sur lequel je reviendrai un peu plus loin, le consommateur dispose d’un montant fixe pour ses dépenses discrétionnaires; ce qu’il a dépensé hier il l’aurait dépensé de toute façon le 3 ou le 4 ou le 20 janvier… ou dans les mois qui viennent. Le corollaire est tout aussi vrai : ce que le consommateur a acheté hier, il ne l’achètera pas dans les jours, les semaines ou les mois qui viennent.

En définitive, pour le même revenu, les commerçants auront donc dû engendrer des coûts d’exploitation additionnels; leur marge de profit en est donc diminuée d’autant.

Revenons maintenant sur la question de l’endettement, car c’est là que le bât blesse. Je trouve paradoxal, voire absurde, même irresponsable, que, dans plusieurs pays industrialisés, les gouvernements veuillent favoriser la consommation pour résorber la crise; une consommation excessive est un des principaux éléments déclencheurs de la crise économique actuelle.

Celle-ci, rappelons-le, a débuté à l’été 2007 avec la débâcle des hypothèques à haut risque (subprime), bref par un endettement excessif du consommateur. Or, l’hyperconsommation tout autant que l’achat d’une maison a contribué à cet endettement excessif; certains augmentaient même le montant de leur hypothèque pour ensuite dépenser cet argent en biens et services de consommation.

D’inciter les gens à consommer pour sortir de la crise économique est aussi logique que de demander à des pyromanes d’allumer des incendies pour occuper les pompiers; la solution porte en elle le germe de son échec éventuel, car elle conduit inéluctablement à l’endettement alors que le taux d’endettement est déjà à un sommet vertigineux.

Comme je l’écrivais le 9 décembre dans la chronique Le produit intérieur brut et la consommation, « les économies des pays industrialisés sont beaucoup trop dépendantes de la consommation »; la solution à la crise actuelle doit reposer beaucoup plus sur la production que sur la consommation. En ce sens, les programmes d’infrastructures que semblent vouloir mettre en place la plupart des gouvernements nord-américains me semblent être une avenue bien plus prometteuse; une fois l’emploi stabilisé, le taux d’épargne augmenté et celui de l’endettement diminué, la consommation pourra reprendre… d’une façon plus réfléchie, plus responsable.